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12 avril 2016

La Passion du Christ

 

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Catégorie : Cinéma

Genre : Drame historique

Année : 2004

Public : Interdit aux moins de 12 ans avec avertissement

Durée : 2H07

Nation : USA/Italie

Réalisateur : Mel Gibson

Acteurs : Jim Caviezel, Maia Morgenstern, Monica Bellucci, Hristo Chopov, Rosalinda Celentano, Sergio Rubini

Synopsis : Les dernières heures de Jésus de Nazareth, le Christ. Après sa prière au mont des oliviers et sa résistance à la tentation de Satan, il est livré par Judas aux autorités juives. Il est flagellé et amené devant Ponce Pilate le préfet romain puis devant Hérode, qui le condamnent à mort. Commence alors un long voyage de souffrance vers la crucifixion alors que Jésus revoit les moments importants de sa vie.  

 

Analyse critique :

(Attention SPOILERS !)

Dans la continuité de notre cycle dédié à Mel Gibson, nous en arrivons au film le plus controversé et peut être le plus culte de l’acteur-réalisateur, j’ai nommé La Passion du Christ sorti en 2004. Un film qui va déchaîner les passions (sans mauvais jeu de mots) et une polémique au sein de l’industrie hollywoodienne.

Mel Gibson, c’était pourtant un dieu à Hollywood ! Immense star, il était l’acteur le mieux payé (environ 25 millions de dollars par tournage). Mais c‘était aussi un réalisateur formidable, notamment auteur d’un grand classique qu’est Braveheart et qui avait obtenu un énorme succès à l’époque. Tout ce que touchait Mel Gibson se transformait en or.

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Il y’avait de quoi devenir ambitieux et même de se prendre pour un demi-dieu, c‘est ce qui le mène à vouloir reprendre la réalisation et à faire un film sur les dernières heures de la vie du Christ. Autant dire qu’il s’attaque à du lourd. C’est d’ailleurs un projet qui avait plus de douze ans pour l’acteur. Et peut être comme Icare, il s’est brûlé les ailes. Car c‘est à partir de ce film que les choses vont changer radicalement pour Mel Gibson.

L’artiste, on le sait, avait aussi ses convictions. Issu d’une famille pieuse, il s’inscrivait à l’image de son père dans un certain traditionalisme chrétien. Et l’acteur-réalisateur va vite découvrir que même si on s’appelle Mel Gibson, il ne fait pas bon être chrétien traditionnaliste à Hollywood. Ensuite, il avait également pris des positions pro-palestiniennes et contre la guerre en Irak, ce qui là encore ne passe pas très bien dans la capitale du cinéma (cela aura un rôle pour la suite, comme nous le verrons).

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Mel Gibson n’était d’ailleurs pas dans la tendance de tous ces artistes qui font de l’exhibitionnisme humaniste pour dorer leur image et devenir bankables. Lorsque Gibson a fait des dons de millions de dollars à des institutions telles que la « Healing the Children », il s’en est presque caché.         

Il n’avait pas réalisé de films depuis 8 ans quand il a eu en tête de faire ce film qu’il baptisa « La Passion du Christ ». Le projet est évidemment pharaonique puisqu’on parle de mettre en œuvre une partie de la vie d’un personnage qui a changé l’histoire du monde. Des films sur le Christ, il y’en a eu, on se souvient du Jésus de Nazareth sous format de mini-série, de Franco Zeffirelli (qui a d’ailleurs fait tourner Gibson dans son Hamlet) mais surtout de L’Evangile Selon Saint Matthieu (chroniqué sur ce blog) de Pier Paolo Pasolini, qui reste peut être le meilleur film fait sur le Christ. Cela dit, l’époque a changé et parler de religion est très polémique. On se souvient par exemple du tôlé suite au film de Martin Scorsese La Dernière Tentation du Christ. Des salles de cinéma qui le diffusaient avaient été saccagées. Mais ici, c’était une partie du public qui s’en prenait au film, alors que l’intelligentsia soutenait plutôt l’idée de Scorsese (Jack Lang l’avait même subventionné dans un premier temps avant que les réactions du public ne le fasse changer d’avis).

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Qui aurait cru que La Passion du Christ allait déclencher un nouveau scandale encore plus grand ? Et cette fois dirigé, non pas par le public, mais par les institutions et l’intelligentsia.

Il faut dire que Mel Gibson a réalisé la portée du projet qu’il avait en main.

Il ne veut pas réaliser un film de plus sur la vie du Christ mais bien une œuvre forte et réaliste qui retranscrive fidèlement les derniers moments du Christ. Il se base alors sur les évangiles, que ce soit celui de Saint Jean, de Saint Matthieu (auquel il semble le plus emprunter), de Saint Marc et Saint Luc.

Il part tourner le tout en Italie, dans une atmosphère spirituelle, puisqu’il fait venir le Père français Charles Roux, en guise d’Aumônier. Il organisera ainsi une messe chaque jour pour l’équipe de tournage.

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L’un de ses premiers soucis, c’est la crédibilité du film. On se souvient des insertions de langues étrangères dans Braveheart. Ici, Gibson veut carrément tourner les films en langues de l’époque : araméen, hébreu et latin. Un sacré parti pris au vu des réactions du public par rapport aux sous-titres, mais c’est aussi un parti-pris qui démontre la vision que Mel Gibson a de son film. Le fait d’introduire le langage de l’époque impose d’entrée un réalisme certain.

Mais outre le langage, ce sont les costumes et les décors qui frappent. Jamais, à ce jour aucune reproduction de la vie du Christ n’avait atteint ce degré de crédibilité visuelle. On se croirait vraiment à la Jérusalem de l’époque.

Mel Gibson a donc su imposer un contexte parfait qui permet l’immersion du spectateur dans les pages d’Evangiles. 

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Mais le réalisme se trouve également au niveau de la violence qui est très crue et très impressionnante. Là encore on y croit vraiment. Et c’est d’ailleurs l’un des principaux reproches qui fut fait au film à sa sortie en 2004. Beaucoup trouvant que Gibson exhibait une violence atroce et allait beaucoup trop loin dans la crudité. Il est clair que rien ne nous est épargné sur les souffrances infligées au Christ. Personnellement, cela ne me dérange pas forcément plus que cela, car je ne pense pas que ce soit gratuit, sadique ou même masochiste de la part de Gibson, comme certains ont pu le dire. Je pense qu’il a sa façon de faire les choses, il a son style de cinéma, qui est sans concession (un peu comme Peckimpah à l’époque) ça ne plaît pas forcément, mais personnellement j’y vois un vrai langage cinématographique à dix mille lieux du gore de certains films d’horreur américain.

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Cela dit, si la violence de l’œuvre fit polémique, le plus gros scandale concernera le fond du film qui sera jugé par certains comme « antisémite ». Le spectre de l’antisémitisme montre donc le bout de son museau et fera évidemment de ce film le scandale numéro 1 de l’époque. Qu’en est-il alors vraiment de cet « antisémitisme » ? Cette accusation est venue du fait que le film montre, conformément aux évangiles, les juifs responsables de la mort de Jésus. En ce sens, si le film doit être considéré comme antisémite, alors cela voudrait dire que la réalité est antisémite.

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En fait, si depuis longtemps les historiens veulent faire de la mort de Jésus un symbole d’un conflit entre juifs et romains, ce n’est pas ce qu’en disent les écrits. Les quatre évangélistes (juifs d’origine d’ailleurs) Matthieu, Jean, Marc et Luc présentent tous les juifs, et non les romains, comme les ennemis et les assassins (direct ou pas) de Jésus. C’est également le cas des écrits de Saint Paul (lui aussi juif d’origine). Certains historiens ont avancé le fait que les évangiles avaient été écrits sous domination romaine et que par conséquent, ils auraient été biaisés par ces derniers pour faire retomber la faute sur les juifs. Tout ceci n’est sans doute pas complètement faux, et les évangiles blanchissent sans doute trop Ponce Pilate dans cette affaire (la scène avec Barrabas n’aurait par ailleurs peut être jamais eu lieu). Cela dit, jamais il n’est dit que Jésus s’était opposé aux romains (« Il faut rendre à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu »), mais en revanche aux marchands du Temple : Pharisiens, Saducéens, Hérodiens, en bref les judéens. Par ses paroles et ses actes, Jésus était leur ennemi logique.

Mais s’il n’y avait que les évangiles, mais des tas d’auteurs de l’époque comme Justin, Origène, Tertullien et Eusèbe affirment dans leurs écrits que les élites juives incitaient à la persécution des chrétiens en les dénonçant aux autorités.

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Mais surtout ! On se demande pourquoi il y’a débat à ce sujet, alors que Le Talmud, livre sacré des juifs (à ne pas confondre avec la Torah) et œuvre de référence du judaïsme rabbinique, attribue lui-même la mort du Christ aux juifs. Il dit même que Jésus brûle en enfer et bouillit « dans des excréments en ébullition » pour l’éternité. D’ailleurs, Le Talmud hait la figure de Jésus et se félicite de sa mort. Peter Schäfer, un professeur juif américain et chef du département d’études juives de l’université de Princeton, est l’auteur du livre Jésus dans le Talmud. Dans son livre, Schäfer montre que Le Talmud attribue la crucifixion du Christ aux juifs et non aux romains, et qu’il décrit Jésus bouillant pour l’éternité dans des excréments. Le livre de Schäfer a été adulé par d’éminents rabbins ! Le magazine américain Publishers Weekly a écrit à son sujet : « Qu’est ce qui est scandaleux, à propos de Jésus, puni en Enfer pour l’éternité, maintenu assis dans un chaudron d’excréments bouillants ? Cette image apparaît dans des manuscrits anciens du Talmud de Babylone, tout comme un court récit du procès de Jésus et de son exécution, non par les romains, mais par le haut tribunal juif, le Sanhédrin ». En effet le Talmud de Babylone contient bien le Sanhédrin 43a qui relate le procès et la condamnation de Jésus. Le Talmud est un livre fondamental et de référence dans le Judaïsme moderne. Ainsi d’éminents membres de la communauté juive tels que Peter Schäfer de même que des rabbins ayant étudié le Talmud attribuent la mort du Christ aux juifs. Dans son livre Peter Schäfer écrit même au sujet de Jésus et de son exécution : « Il était un blasphémateur et un idolâtre, et bien que les romains n’en avaient probablement pas grand-chose à faire, nous avons insisté et il a eu ce qu’il méritait. Nous avons même convaincu le gouverneur romain (ou plus précisément : lui avons forcé d’accepter) que cet hérétique et imposteur devait être exécuté et nous en sommes fiers ». Voilà qui est explicite ! Cette phrase est authentique, je ne fais que la citer ! Et le Publishers Weekly n’y voit rien de choquant !

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Mais alors ! Une question se pose : Pourquoi lorsque Mel Gibson dit la même chose que les écrits religieux rabbiniques et que plusieurs notables juifs, au sujet de la mort de Jésus, il est traité d’antisémite et blâmé par l’intelligentsia ? On condamne le film de Mel Gibson et on adule le livre de Peter Schäfer alors qu’ils disent au final la même chose. De plus, pour en revenir au film, on notera que Gibson avait senti venir le coup et avait pris ses précautions en mettant des personnages juifs bienveillants en plus des bourreaux du Christ contrairement à ce que prétendra Abraham Foxman qui déclara : « Dans ce film, les juifs sont assoiffés de sang, les juifs sont vengeurs, les juifs sont les mauvais, les romains sont cléments et gentils, ce sont les juifs qui les obligent à crucifier Jésus ». Foxman n’est plus à un mensonge près. Premièrement les romains crucificteurs du film sont loin d’être montrés comme « cléments et gentils », ce sont des sadiques notoires. Concernant les juifs, on en trouve aussi de bons comme je le mentionnais plus haut. On voit notamment un Saducéen s’opposer à la condamnation de Jésus et un juif venir l’aider à porter la croix. Mais cela ne suffira pas à calmer les ardeurs, et au final peut être que Spike Lee n’avait pas tort lorsqu’il déclarait qu’à Hollywood « Il existe une loi non écrite selon laquelle vous ne pouvez pas avoir un personnage juif dans un film qui ne soit pas à 100% parfait, ou alors vous êtes qualifié d’antisémite ».

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En réalité, il faut s’intéresser au dessous de cette polémique pour la comprendre. Le scandale « d’antisémitisme » pour La Passion du Christ est le fruit de certaines personnes voulant grappiller des sous, mais c‘est également politique. En réalité, ce n’est un secret pour personne, à l’époque, Mel Gibson était pro-palestinien et alors qu’en 2004, la politique d’Ariel Sharon devenait de plus en plus criminelle et meurtrière à l’égard du peuple palestinien, les élites sionistes redoublent de vigilance. Ainsi, certains ont vu à travers La Passion du Christ un moyen d’attaquer Mel Gibson et de le discréditer dans son engagement. On se souvient aussi qu’à cette même période, en France, nous avons eu un cas similaire avec l’affaire Dieudonné, suite à un petit sketch télévisé. C’était la période de la chasse aux sorcières, de la chasse aux « antisémites ». Certes on pourra me rétorquer qu’après ce film, Gibson a eu des propos durs contre la communauté juive, mais le scandale en fut peut être aussi à l’origine…  

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Le film sera également taxé de misogyne, car Satan est interprété par une femme (androgyne cependant), et que soit disant, Marie ferait figure de « femme soumise ». Bref il ne manquait plus que les féministes (toujours à l’affût de cracher sur la religion catholique) s’en mêlent. Là encore inutile de préciser que cette accusation est ridicule.

Maintenant que nous savons à quoi nous en tenir concernant les polémiques, venons-en au film en lui-même. Comme je l’avais déjà évoqué plus haut, Mel Gibson a signé une reconstitution ultra-réaliste et une fresque puissante et magnifique. Sa réalisation atteint là des sommets. Il joue admirablement bien sur les ralentis (ce qu’il avait déjà pu démontrer dans Braveheart) pour donner un côté rituel et messianique à chaque scène. En voyant le film on a vraiment l’impression de vivre un grand moment de cinéma.   

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Le casting est également superbe.

Jim Caviezel est absolument incroyable dans ce qui est sans conteste le rôle de sa vie qui l’a marqué à jamais. Il faut d’ailleurs savoir que tout comme Mel Gibson, il est lui aussi chrétien traditionnaliste. Il s’impliquera à fond dans le rôle, il fut d’ailleurs vraiment blessé sur certaines séquences, et décrit le tournage comme une « authentique expérience spirituelle ».

Cette expérience spirituelle fut d’ailleurs partagée par Pedro Sarubbi qui joue le rôle de Barrabas et qui trouva la foi au cours du tournage. Il a d’ailleurs écrit un livre en 2012 intitulé De Barrabas à Jésus, converti par un regard, qui fait le récit de sa conversion. Une histoire extraordinaire !

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Le reste du casting est majoritairement composé d’acteurs inconnus (ce qui est le mieux pour ce genre de production) à part Monica Bellucci dans le rôle de Marie Madeleine.

De son côté, Mel Gibson ferait une apparition indirecte. Ce serait sa main qui enfoncerait un clou dans celle du Christ.

Pour la musique du film, Mel Gibson ne choisira pas James Horner cette fois-ci. Cela signifie ce que symbolise pour lui La Passion du Christ : une œuvre unique et détachée de ses films précédents. Il fait donc appel à John Debney et Gingger Shankar. Et clairement, leur travail n‘a rien à envier aux meilleures partitions d’Horner. La BO de La Passion du Christ est incroyablement envoûtante et divine. Elle procure vraiment un effet particulier et accompagne la perfection les images. Personnellement elle me fait vraiment une sacrée sensation dés que je l’entends. Elle fut d’ailleurs nominée aux oscars. C’est honnêtement l’une des BO les plus touchantes que j’ai entendu dans un film.

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Après, certains ont pu souligner un manque de spiritualité dans le film. En réalité, il y’a de la spiritualité dans La Passion. Mais pas comme dans les films habituels. Ici c’est plus fort. Ça ne passe pas par les dialogues mais bien par l’essence et l’atmosphère du film. C’est un cinéma qui peut se rapprocher de la philosophie Kubrickienne où tout doit passer d’abord par l’émotion avant de permettre au spectateur d’assimiler le message sur le temps. Ce concept s’applique vraiment à La Passion du Christ.Et que Dire de la séquence de la résucrection qui tout en étant simple est l"une des plus belles et puissantes scènes que je n'ai jamais vu.

A l’époque, nous l’avons vu le film a fait l’objet de polémiques et ce avant même sa sortie (ce qui est en soit un « exploit »). Si bien que Mel Gibson s’est senti obligé de couper la fameuse réplique concernant le sang de Jésus rejaillissant sur le peuple juif. Bien vite le film est devenu un défouloir pour les médias.

Les critiques se déchaînent de toutes parts.

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Le cinéaste néerlandais Paul Verhoeven membre du « Jesus Seminar » se devait de réagir à la sortie d’une telle œuvre. Il reprocha beaucoup au film et déclara qu’ « on n’apprenait pas à y connaître Jésus » ni à « savoir ce qu’il défendait ». Tout à fait vrai, mais ce n’est pas le but du film qui estime que ses spectateurs connaissent Jésus sans quoi ils peuvent se reporter au magnifique film de Pasolini L’Evangile selon Saint Matthieu ou Le Jésus de Nazareth de Franco Zeffirelli (ou encore mieux au Nouveau Testament). Ce n’est pas un reproche qu’on peut faire à Gibson d’avoir voulu se démarquer et de ne pas tomber dans la redite, en choisissant de se centrer sur un épisode en particulier. Verhoeven reprocha également à Gibson de s’en tenir à « une pensée religieuse et dogmatique : les non-chrétiens finiront en Enfer » et d’avoir ainsi une vision « catholique psychotique ». Une belle connerie ! Mais venant d’un membre de la « Jesus Seminar », cela ne surprend guère et montre surtout que Verhoeven a interprété le film comme il le souhaitait et que surtout il ignore tout du sujet dont il parle. Il le confirma d’ailleurs quand il déclara que « dans La Passion du Christ, on ne rencontre pas de Dieu Bienveillant ou de miséricorde. Son Dieu à lui n’est pas totalement éloigné de la cruelle divinité mexicaine Quetzalcóatl qui exigeait en permanence des sacrifices humains ». Premièrement Quetzalcóatl est dans la culture aztèque, une figure bienveillante à laquelle on n’aurait jamais offert de sacrifice puisque le chef toltèque Ce Acatl Topiltzin Quetzalcoatl était contre la violence et interdisait les sacrifices. Ensuite, à aucun moment le Dieu décrit par Mel Gibson ne paraît une divinité sanguinaire en soif de morts sacrifices, bien au contraire. La miséricorde que ne semble pas voir Verhoeven se trouve bien à travers le personnage de Jésus assumant à travers ses souffrances les péchés des humains, et à travers la résurrection. Paul Verhoeven disserte donc sur des sujets qui le dépassent totalement. Il faut savoir qu’il considère son personnage de Robocoq comme « un jésus américain ». Il voit même en jésus « un terroriste radical » ou un Che Guevara. Pour vous montrer le niveau…. Donc bon Popaul, t’es gentil, on t’aime bien mais retourne faire du pop-corn ça t’évitera d’étaler ton ignorance et de passer pour un con.

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Il y’aura aussi la série South Park, (qui perd de sa superbe d’année en année), qui se joindra à la meute en livrant un épisode intitulé « La Passion du Juif », qui décrit Mel Gibson comme un fou furieux masochiste, scatophile et pervers et les fans du film comme des nazis exterminateurs de juifs ou des crétins. Un épisode qui est à pleurer de vulgarité mais qui montre bien le tôlé déclenché par la polémique. Ce qui est marrant, c’est que le petit Matt Stone qui joue le mec cool et politiquement incorrect, peut devenir une petite ordure parce qu’on a effleuré sa communauté (Matt Stone étant juif). Ce n’est d’ailleurs pas la première fois qu’il se livre à ce genre d’exercices crétins. Certes on pourra me répondre que dans les années qui suivirent Gibson a eu plusieurs dérives (l’alcoolisme notamment). Mais on ne l’accusait nullement de tout cela à la sortie du film et l’acharnement qu’il a subi de part et d’autre a pu être un facteur déterminant dans ses dérives.

Tout cela montre bien à quel point une véritable campagne de diffamation et de diabolisation s’est mise en marche contre le film et son auteur. Et au final ça montre aussi l’image qu’Hollywood a du christianisme.

   

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Pour Mel Gibson, ça sera le début des problèmes. Et celui qui était le gars le plus populaire d’Hollywood devient aussitôt un infréquentable et méchant chrétien traditionnaliste, antisémite et assoiffé de sang.

On parla d’interdire le film dans certains pays et de façon plus générale en Europe.

Pourtant l’intelligentsia aura beau éreinter le film, c’est le public qui reste roi. La Passion du Christ ne partait pas gagnant, puisque Mel Gibson avait eu énormément de mal à trouver un distributeur et au final le réalisateur dût payer le tout avec ses propres moyens. Le film est 100% indépendant. En Europe, il sera finalement distribué par Tarak Ben Ammar. Mais au final, le buzz fait autour de La Passion du Christ jouera en sa faveur. Il sortit le Mercredi des Cendres. Le film fit exploser le box office ! Aujourd’hui encore, il détient le record du plus grand nombre pré-ventes de l’histoire du cinéma.

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Les projections laissent enchantés des tas de personnalités et d’hommes politiques ou religieux à travers le monde. Certaines réactions sont cependant marquantes. On se souviendra de l’histoire de ce pasteur brésilien de 43 ans : José Geraldo Soares, qui mourut d’un arrêt cardiaque durant les scènes du chemin de croix. Deux autres spectatrices auraient également fait des arrêts cardiaques suite à la projection du film. On raconte que des spectateurs se convertirent au christianisme après avoir vu le film, ce qui « fait froid dans le dos » selon le petit crétin Gilles Verdiani (à l’époque critique pour TéléCinéObs). Et oui le succès est indéniable. Succès que le film connaîtra également dans des pays du Moyen Orient à majorité musulmane. Ce qui est à moitié surprenant, puisque le Coran décrit le Christ comme un prophète et un messie messager de Dieu, mais a une autre vision de sa mort et de la crucifixion.  

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Le distributeur Tarak Ben Ammar fera même réaliser des sondages par l’Ipsos et le Figaro pour connaître l’avis du public. Aux questions :

- Est-ce que le film est trop violent ? 57% jugèrent que non

- Est-ce que le film favorisait l’antisémitisme ? 88% jugèrent que non

- Est-ce que le film est conforme aux évangiles ? 85% jugèrent que oui

Comme le souligna Ben Ammar : « le décalage entre les critiques et le public est de plus en plus grand et le public a toujours raison »   

Le film va même devenir l’une des œuvres les plus rentables de l’histoire du septième art. Le succès est total ! Comment l’expliquer ? Tout simplement parce que La Passion du Christ est une œuvre universelle.

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Mel Gibson décrit son film ainsi : « Mon intention avec ce film était de créer une œuvre d’art et de stimuler le débat et la réflexion parmi des publics d’horizons différents ». Il ajoute : « Mon espoir ultime est que le message de courage et de sacrifice véhiculé par cette histoire inspire la tolérance, l’amour et le pardon. Des valeurs dont nous avons désespérément besoin de nos jours.(…) L’un des grands espoirs que je place dans ce film est que quand les spectateurs quitteront la salle, ils voudront poser plus de question ». On est donc bien loin des intentions « psychotiques » et « dogmatiques » que Paul Verhoeven prêtait à Mel Gibson. Le film n’est en rien extrémiste et sert juste à rendre compte du terme de la vie du Christ qui quelque part est l’aboutissement de son œuvre immense. C’est aussi un film sur le mal et la tentation du mal. Tentation qu’a la foule lynchant le Christ et à laquelle ce dernier résiste jusqu’à la fin.

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Le film nous dresse un portrait édifiant de la barbarie et de la cruauté dont est capable l’être humain. Mais concernant cette tentation, on oubliera pas les scènes avec Satan. Mel Gibson les décrits d’ailleurs : « Le Mal est enjôleur, attirant. Il a l’air bon, presque normal, mais en même temps pas tout à fait. C’est ce que j’ai essayé de faire passer avec le Diable dans le film. C’est l’essence du mal : prendre ce qui est bon et le détourner légèrement ». C’est l’actrice italienne androgyne Rosalinda Celentano qui incarne Satan dans le film. Ces sourcils furent rasés et ses scènes tournées au ralenti pour lui donner un aspect surnaturel. D’ailleurs pour renforcer l’aspect surnaturel et la confusion générée par Satan, Mel Gibson a fait doubler l’actrice par un homme sur certaines séquences. 

 

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La Passion du Christ c’est donc l’histoire des évangiles, celle d’un homme qui supportera les péchés des humains à travers toutes ses souffrances.

Il ne s’agit nullement d’un film extrémiste, prosélytique qui se résume à deux heures de tortures comme ont pu le dire certains. C’est une œuvre sur le rejet du message divin d’amour et de paix véhiculé par le Christ, et qui peut paraître totalement d’actualité aujourd’hui. On pourra y voir un film sur l’intolérance également, sur l’oligarchie éliminant ses ennemis. C’est une œuvre, à la fois chrétienne, religieuse, spirituelle, philosophique, viscérale, psychologique, sociale, politique et donc en fin de compte universelle.    

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Personnellement, je n’ai vu ce film qu’une seule fois à ce jour, mais c’est un film qui vous reste longtemps après son visionnage. Une œuvre qui comme le Salò de Pasolini, le 2001 de Kubrick dépasse la notion de cinéma. C’est un film qui se vit.

Avec La Passion du Christ, Mel Gibson a donc réalisé un chef d’œuvre maudit qui consumera sa carrière. Et c‘est aussi à cela qu’on voit la portée courageuse d’une telle œuvre.

Un film qu’il faut avoir vu au moins une fois dans sa vie.       

 

     

 

Note : 18/20

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Commentaires
A
à vince : et rien à voir, mais je viens de publier la chronique de I Love Snuff. J'ai repris celle de Naveton en plus de celle d'Inthemood. Je me suis également permis de te choisir un avatar mais tu peux le modifier si tu en as envie. Bref redis moi s'il te convient
V
Ah, je jubile ! Une excellente chronique, et la mise au point avec Paul Verhoeven est la cerise sur le gâteau. Je n'avais jamais compris pour ma part le rapprochement entre robocop et le christ (enfin, disons qu'il était strictement factuel dans le côté résurrection mécanique, sans la portée spirituelle ou morale), et revoir Paul opposé à Mel fait en effet prendre du recul.<br /> <br /> Pour ce qui est de l'épisode de south park, j'étais un peu moins remonté, leur mauvais goût les emmenant souvant dans des situations absurdes où l'on se moque de la stupidité des personnages. Il serait malavisé de considérer sérieusement cette série, même lorsqu'elle se confronte à des problèmes sociaux réels. Ils ne respectent rien non plus aussi, ce qui leur confère un côté charlie hebdo quand ils mettent en scène les célébrités. Toutefois, je suis d'accord que la série s'y est attaquée au moment du battage médiatique (un peu opportuniste), et qu'elle donne une vision régressive du film et de la situation (elle ne montre rien du film d'ailleurs), davantage pour désamorcer la controverse et rappeler qu'il s'agissait d'un film. Je pense que c'est ainsi en tout cas que les créateurs de la série auraient justifié leur démarche.<br /> <br /> Après, tu connais mes opinions sur le film et sur la démarche de Mel, ainsi que mon point de vue sur les accusations d'antisémitisme (qui curieusement ne touchent pas les autres films traitant de jésus alors qu'il est crucifié également par les accusations des juifs).
V
à Inthemood: Honnêtement je n'ai revu que quelques passages pour la chro (car les images que je mets en ligne sont prises directement du DVD, ce qui m'oblige à en visionner quelques parties) ce qui m'a permis, il est vrai, de revoir les détails de certaines séquences. Mais après honnêtement je ne l'ai pas regardé comme on regarde un film depuis 2003. Mais c'est un film qui m'avait énormément marqué (la scène de résurrection est resté intacte dans ma mémoire). C'est vrai sinon qu'il aurait pu avoir une interdiction plus élevée. D'ailleurs à l'époque ma grand mère m'avait dit que s'il avait su qu'il était si violent, elle ne m'aurait pas emmené le voir.
I
à vince: rassure moi, tu as quand même revu le film depuis 2003? Sinon, tu as une mémoire phénoménale! Un très grand film au souffle épique et historique, même si l'on n'est pas croyant ou chrétien. Caviezel est exceptionnel. Le -12 est cependant incompréhensible vu le niveau de violence du film.
V
à Oliver: A l'époque il avait même battu des records pour un film indépendant je crois. Sinon moi aussi je crois que je vais le revoir. En fait la dernière fois que je l'ai vu c'était avec ma grand mère à sa sortie au cinéma en 2003. Je me souviens que j'avais 12 ans j'avais tout juste l'âge et pourtant je m'en souviens comme si c'était la veille que je l'avais vu tellement il m'avait marqué.
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