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30 novembre 2015

Tintin au Pays des Soviets

 

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Catégorie : Bande dessinée

Genre : Aventure

Année : 1930

Nombre de pages : 141

Nation : Belgique

Auteur : Hergé

Synopsis : Tintin reporter du « Petit Vingtième » et son fidèle chien Milou sont envoyé en URSS pour effectuer un reportage sur le pays. Cependant, tenus au courant de son arrivée à Moscou, les soviétiques décident d’envoyer un agent secret pour l’éliminer. Pour Tintin et Milou c’est le début d’une série de péripéties et d’aventures au cœur de l’URSS.  

Analyse critique :

(Attention SPOILERS)

Comment ne pas évoquer Tintin, tout simplement l’une des égéries les plus célèbres de l’histoire de la bande-dessinée. L’œuvre d’un certain Hergé, qui a su mettre à jour un travail superbe narrant les aventures passionnantes d’un jeune reporter que rien n’arrête. J’ai donc décidé de dédier sur ce blog, un cycle aux aventures de notre héros belge à la houppette.

Georges Rémi dont les initiales R.G donnent Hergé est né le 22 mai 1907 à Etterbeek. Hergé commença à dessiner en 1924 en tant qu’amateur pour une revue scoute (car l’auteur vu boyscout dans sa jeunesse). Puis il se fait embaucher au quotidien « Le Vingtième Siècle ». Il est ensuite chargé de diriger un supplément hebdomadaire destiné à la jeunesse et baptisé « Le Petit Vingtième ». Au début il n’obtient que très peu de succès auprès du jeune public. Il faut aussi dire qu’il est le premier francophone à reprendre le principe de Bande-Dessinée qui vient des Etats-Unis. Mais en 1929, « Le Petit Vingtième » décolle quand Hergé rédige « Les Aventures de Tintin ».

1

Né alors celui qui va devenir l’un des personnages les plus cultes de l’histoire de la Bande dessinée. D’ailleurs comment est né Tintin ? Visiblement il serait inspiré de Totor, l’un des premiers personnages crée par Hergé. Mais Tintin serait aussi largement influencé par le personnage de Léon Degrelle grand ami d’Hergé. Cette influence fait d’ailleurs débat et polémique, pourtant il n’y a guère de doutes à avoir quant au lien entre Degrelle et Tintin. Degrelle était un baroudeur idéaliste et aventurier. Il était d’ailleurs reporter pour « Le Vingtième Siècle » et avait notamment effectué un long reportage au Mexique. Sur certaines photos de l’époque, on peut même le voir avec des culottes de golf semblables à la célèbre panoplie de Tintin et même coiffé d’une houppette. Seulement voilà ! Léon Degrelle est évidemment l’une des personnalités les plus sulfureuses de l’histoire de Belgique. Degrelle était un nationaliste acharné fondateur du mouvement politique Rexisme classé à l’extrême droite. Il collabora notamment avec l’Allemagne Nazie et fut Waffen SS. On comprend que le mythe en prend un coup. Tintin inspiré d’un nazi ? Quelle image douloureuse ! Pour l’intelligentsia il est trop dangereux d’associer un personnage si populaire au nazisme. Et pourtant, que ça plaise ou non, il n’y a une fois encore peu de doutes à avoir concernant cette inspiration. On note par ailleurs qu’en 1930 Degrelle fut accueilli en héros gare Louvain par une immense foule. On retrouve exactement la même scène lors du retour de Tintin à Bruxelles. La Parenté Degrelle/Tintin n’a d’ailleurs pas échappé aux artistes de l’époque comme en témoigne le dessin d’un certain J-l Lejeune.

2

2,5

       

Certes, on pourra rétorquer qu’Hergé s’en ai défendu alors que Degrelle l’a clamé. Alors Degrelle est-il trop vantard ? Ou Hergé a préféré éviter le scandale à l’après guerre (rappelons qu’il fut arrêté pour des faits de collaboration) ? On pourra laisser le soin à chacun de trancher la question. Mais notons que cet album s’inscrit également dans l’idéologie du rexisme, le parti de Dégrelle, auquel adhérait Hergé et qui militait entre autre farouchement contre le communisme et l’URSS. De plus, on pourra citer également le livre de Degrelle Tintin mon Copain qui apporte de nombreux arguments quant au fait que Tintin fut inspiré de Degrelle. Le livre fut d’ailleurs interdit et sur les 1000 exemplaires édités, 850 ont été détruit. Cela veut tout dire. Mais le livre reste dispo sur le net en version PDF et comme sur E-Pôle-Art on aime bien les œuvres interdites mais qu’on n’aime pas trop qu’on brûle les livres, Tintin mon Copain sera probablement chroniqué ici.  

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Mais revenons à l’album qui nous concerne. En 1930, donc Hergé met sur planches les aventures de Tintin qui sont publiées dans le « Petit Vingtième ». Ce n’est que face aux énormes succès qu’elles rencontrent que l’auteur décide d’en faire un album. Cet album, c’est donc Tintin au Pays des Soviets.

Tintin au Pays des Soviets se présente donc sous la forme de plusieurs aventures se déroulant dans l’URSS de Staline. Tintin est la plupart du temps confronté à des péripéties ou à des agents de la Guépéou.

3,5

Cet album est donc édité en noir et blanc. On découvre pour la première fois Tintin sous la plume et le crayon d’Hergé. Il a déjà sa célèbre houppette, cependant le dessin n’est pas encore affiné. Au tout début de l’album, Tintin a même une très drôle d’allure, mais sa silhouette se peaufine au fur et à mesure de l’avancement de l’album.

Tintin aux Pays des Soviets connut un immense succès à l’époque mais il fait aujourd’hui partie des albums les plus critiqués. On reproche notamment à cet œuvre d’être trop caricaturale, anti-communiste et propagandiste.

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Caricaturale ? Certes, en même temps nous nous trouvons dans une BD enfantine et certaines caricatures sont assez drôles bien que certaines soient grosses comme des maisons, on peut d’ailleurs citer les clichés sur les chinois tortionnaires. Anti-communiste ? Là encore clairement, d’ailleurs « Le Petit Vingtième » était un journal nationaliste farouchement opposé au communisme. Hergé avait baigné dans cette ambiance depuis sa jeunesse et suivait donc les mêmes idéaux. J’en renvois là encore au lien avec Léon Degrelle. Propagandiste ? Désolé mais je ne vois pas vraiment. Certes on est dans de l’anticommunisme, mais on est surtout dans de l’antibolchevisme et dans une critique satirique et féroce de l’URSS. Qu’y a-t-il de propagandiste ou de trop caricatural dans Tintin aux Pays des Soviets ? Le fait que les paysans se fassent piller leur blé et subissent des violences s’ils n’en ont pas ? Pardon, mais il suffit de connaître l’histoire des koulaks pour savoir qu’il n y a là rien de surréaliste, bien au contraire même. Est-il propagandiste et trop caricatural de montrer ces enfants affamés se faire rosser quand il demande un bout de pain ? C‘est là encore mal connaître l’histoire de l’URSS dont les pages sombres contiennent tout de même les holodomors. A savoir les exterminations par la famine qui eurent lieu entre 1921 et 1922 et entre 1932 et 1933 et qui firent des millions de morts. La critique que dresse Hergé à ce niveau est plus que justifiable. On peut même saluer son courage car il fut à l’époque l’un des rares à dénoncer l’Holodomor qui est sans aucun doute la pire horreur du vingtième siècle.  

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Il critique ici un gouvernement totalitaire dont l’idéologie, désolé de le rappeler, est restée à ce jour la plus meurtrière de l’histoire. C’est d’ailleurs même reconnu officiellement.

Certes, une fois encore on peut trouver des dessins très caricaturaux, comme le vote sous la menace d’armes, mais il s’agit d’une métaphore satirique pour souligner la falsification des élections organisées par les bolcheviks. Il y’a donc plusieurs dessins caricaturaux je ne le nie pas, mais je ne vois pas de propagande réelle dans cet album. J’y vois la critique et la satire d’un régime politique. Il n’y a donc aucune raison à mes yeux de s’offusquer qu’on soit d’accord ou non avec cela.

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Mais on a également accusé Tintin au Pays des Soviets d’être antirusse et de présenter ce peuple comme un ramassis de brutes et de dégénérés. Si l’album n’est pas tendre avec les bolcheviks, il n’en va pas de même avec le peuple russe exploité, notamment les paysans et les affamés qui sont montrés avec beaucoup d’humanité. Là encore donc, la critique n’est pas justifiée.

Mais en fait ce qui semble réellement gêner certains avec cet album, c‘est que cette satire est réalisée par un nationaliste pour un journal catholique traditionnaliste. Si Hergé avait été un socialiste de la gauche modérée, sans doute que l’album n’aurait pas fait de vagues au fil du temps.

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J’ajouterai qu’à l’époque il était moins évident de critiquer l’URSS dont les crimes n’étaient pas officiellement reconnus et qui était défendu par une bonne partie de la gauche européenne. 

Mais pour en revenir à cette BD en elle-même, on peut dire qu’on a droit à une série d’aventures de bonne facture. Certes, on est loin de ce que deviendra le mythe Tintin et il s’agit de petites aventures parfois anecdotiques avec des effets tantôt burlesques, tantôt épiques. D’ailleurs, il est marrant de voir que Hergé qui impose un peu Tintin comme un modèle de jeunesse, n’hésite pas à le tourner parfois en ridicule pour amuser son jeune public. Ce Tintin est assez différent de celui que nous connaîtrons par la suite. Il est ici assez fanfaron et parfois même quelque peu fantasque.

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Mais nous parlons beaucoup de Tintin, il ne faudrait pas oublier son fidèle compagnon, le fox terrier Milou qui le suit partout. Ce personnage est le plus enfantin et donc taillé pour le jeune public.

Mine de rien Hergé signe donc une bonne BD d’aventures.

A sa sortie, Tintin aux Pays des Soviets sera d’ailleurs un grand succès auprès du jeune public. Il imposa d’emblé le mythe de ce reporter à la houppette. Ce n’est que bien des années après que viendront les polémiques le concernant. C’est sans doute en raison de ces polémiques que Tintin aux Pays des Soviets est le seul album de la série à n’avoir jamais été édité en couleur. Il fut également banni lors de l’adaptation télévisée en dessin animée Les Aventures de Tintin.

9

Pour ma part, je considère Tintin aux Pays des Soviets comme un premier essai tout à fait honorable qui a certes encore pas mal de défauts mais qui critique de façon féroce la doctrine et la politique de L’URSS ainsi que le bolchevisme.

Une légende est en marche.                     

           

Note : 16/20

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Commentaires
V
à Vora: On aura effectivement l’occasion de reparler de son aide aux picaros. Pour le secret de la licorne j'avoue que je n'y avais pas pensé et c'est effectivement une analyse à la fois amusante et intéressante.
V
Ha ha ^^ C'est vrai que tu avais déjà abordé l'idée de lancer un cycle sur ce petit dissident de Tintin ^^ J'attends de voir comment tu traiteras les odieuses complicités avec le guerilleros révolutionnaire Alcazar et l'évasion fiscale que constitue la découverte plus ou moins déclarée du secret de la Licorne...<br /> <br /> <br /> <br /> Très bonne chronique en tout cas, une repolitisation assez appropriée du personnage qui ma foi tape assez fort pour commencer ses reportages.
V
à Borat: en quoi n'est il pas bon ?
V
à Borat: Pitoyable me paraît un peu fort, il faut comprendre qu'à l'époque si tu parlais du génocide de la population russe on te taxait de menteur, de fou et d'amateur de théories du complot un peu partout dans le monde. Ce que décrit ici Hergé ce n'est que près de 60 ans plus tard qu'on le reconnaîtra.
B
Très mauvais en ce qui me concerne, sans compter que le dessin n'est jamais à la hauteur...
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