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6 juillet 2015

Comizi di Amore/Des Oiseaux Petits et Grands

 

0

 

COMIZI D’AMORE

 

1

 

 

Catégorie : Cinéma

Genre : Documentaire

Année : 1964

Public : Tous Publics

Durée : 1H25

Nation : Italie

Réalisateur : Pier Paolo Pasolini

Acteurs : Pier Paolo Pasolini, Alberto Moravia, Cesare Musatti.

Synopsis : Pasolini mène une enquête sur la sexualité dans la société italienne. Il interroge alors des personnes de sexe, d’origine et de classe sociale différentes sur quatre points essentiels : L’éducation sexuelle des enfants, les « déviances » sexuelles, le divorce et la prostitution.

 

Analyse critique :

(Attention SPOILERS !)

Le premier article de cette chronique sera donc consacré à Comizi D’Amore également appelé Enquête sur la Sexualité.

Il s’agit là d’un documentaire réalisé par Pier Paolo Pasolini. Ce film porte donc sur la question taboue de la sexualité dans la société italienne.

Il faut savoir que la sexualité est un sujet qui a beaucoup préoccupé Pier Paolo Pasolini qui était notamment un homosexuel revendiqué. Pasolini se posait donc plusieurs questions sur la sexualité et donnait à ce débat une place essentielle dans le discours social.

2

Son documentaire débute sur une question posée à plusieurs enfants : « Savez-vous comment vous êtes nés ? ». La plupart des enfants répondent par l’histoire de la cigogne ou du chou. D’autres semblent en savoir davantage mais reste gênés face à la caméra. Il faut dire que c’est assez intéressant de voir les réactions des enfants des années 60, qui sont loin de la génération internet qui a plus d’accès à l’information.

Par la suite, Pasolini discute avec deux intellectuels italiens de gauche que sont Alberto Moravia et Cesare Musatti, avec lesquels il décide de parler de la sexualité. Leur débat sera étiré sur tout le film entrecoupant le déroulement du documentaire.

Pasolini part donc interroger des gens dans toute l’Italie. Au nord comme au sud, dans les milieux urbains comme ruraux. Dans la vieille et nouvelle génération. Il s’attache aussi à interroger toutes les classes sociales. Il ne pourra cependant pas vraiment obtenir l’opinion de la classe bourgeoise.

  

3

Le cinéaste axe son débat sur quatre questions principales.

La première concerne l’éducation sexuelle des plus jeunes au sein de la société. La plupart des italiens semblent être assez perplexe. Le débat dérive d’ailleurs bien vite sur la question générale de la sexualité dans la société. La plupart semble lui donner une place importante mais secondaire. On remarque cependant que les gens de l’époque semblent encore quelque peu entourés de tabous par rapport à cette question.

Ensuite, Pasolini parle des « déviances sexuelles » comme l’homosexualité. Dans tous les milieux où la question est posée, les réponses sont plus ou moins semblables. Les gens éprouvent du dégoût envers l’homosexualité quand ce n’est pas de la compassion. Tous souhaitent ne pas avoir d’enfants invertis. C’est d’ailleurs une démarche courageuse de la part de Pasolini qui est homosexuel d’aller poser ces questions et d’écouter attentivement les réponses. A aucun moment il ne juge son interlocuteur sur ses positions.

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Ensuite est évoqué la question du divorce. Un débat qui faisait rage à l’époque en Italie concernant le fait de créer une loi autorisant à divorcer. Pasolini se trouve dans le sud de l’Italie dans une région traditionnaliste. On constate qu’en règle générale, les hommes sont contre le divorce et les femmes sont pour. Le réalisateur met d’ailleurs en avant les violences conjugales et même les meurtres domestiques comme argument à la légalisation du divorce.

Puis vient enfin la question sur la prostitution. Concernant ce débat, la plupart des gens interrogés sont nostalgiques des maisons closes et pensent que la prostitution telle qu’elle se pratique désormais est génératrice de maladie.

6

Pasolini finit en nous montrant un mariage. Le cinéaste ne tire pas vraiment à mon sens de conclusion de son enquête, il semble laisser libre le spectateur d’interpréter ce qu’il a vu.

Cependant il affirme que la société italienne n’est pas forcément en marche vers son bien-être. Quand on connaît le penseur plutôt marxiste et libertaire qu’était Pasolini à l’époque (et peut-être même freudien), on peut se dire qu’il doit trouver archaïque le concept de cellule familiale, du rejet de l’homosexualité ou l’hostilité face au divorce.

Pasolini prônait la libération sexuelle et en ce sens il s’inscrivait dans le mouvement des années 60 qui allait éclore. Le fait que la bourgeoisie n’est pas voulue donner son opinion aura des répercussions dans l’œuvre de Pasolini. Il prendra conscience que c’est un milieu où la sexualité est taboue et c’est probablement cela qui le mènera à réaliser Théorème en 1967.

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Ce documentaire est donc très intéressant car il est la première œuvre de Pasolini fait sur l’un de ses sujets de prédilection : la sexualité.

Là encore sa vision sur le sujet évoluera beaucoup au fil de son œuvre comme nous aurons l’occasion de le voir. Au moment de Comizi d’Amore, Pasolini est plutôt un libertaire prônant la libération sexuelle et la tolérance envers l’homosexualité.

Cela dit, le documentaire reste plutôt neutre et se veut surtout un témoignage de l’opinion de la société italienne des années 60 sur la sexualité.

Comizi D’Amore ou Enquête sur la Sexualité est donc une œuvre tout à fait intéressante.                          

Note : 16/20

 

DES OISEAUX, PETITS ET GRANDS

 

 

7

       

Catégorie : Cinéma

Genre : Comédie Dramatique

Année : 1966

Public : Tous Public

Durée : 1H25

Nation : Italie

Réalisateur : Pier Paolo Pasolini

Acteurs : Toto, Ninetto Davoli, Femi Benussi

Synopsis : Toto le père et son fils Ninetto arpentent les routes de l’Italie croisant le chemin de toutes sortes d’individus. Ils finissent par rencontrer un corbeau doté de la parole qui décide de les accompagner sur leur chemin tout en leur racontant des paraboles et en philosophant. Les trois êtres vont ainsi vers l’inconnu. 

 

Analyse critique :

(Attention SPOILERS !)

Pasolini est décidemment un artiste surprenant et imprévisible. En 1964 le cinéaste qui s’était déjà fait une réputation, venait de faire un véritable monument qui était L’Evangile Selon Saint Matthieu. Après ce chef d’œuvre pour lequel il s’est beaucoup donné, Pasolini semble vouloir décompresser de son propre aveu. Son prochain film sera beaucoup plus léger. L’artiste le décrit lui-même comme une simple mise en scène.

Pourtant, même quand Pasolini veut faire dans le « léger » (j’insiste sur les guillemets), il vous pond une œuvre géniale.

Des Oiseaux Petits et Grands est tout simplement un film très attachant mais également assez profond.

8

Il met en scène le périple entre un père Toto et son fils Ninetto sur les routes d’Italie. Les deux hommes finissent par faire la rencontre d’un corbeau « intellectuel de gauche » qui va les accompagner dans leur périple.

Des Oiseaux Petits et Grands et donc une œuvre assez particulière. Certains l’ont parfois qualifié de « Road-Movie sans voiture », un qualificatif qui lui correspond très bien.

A la base, il faut savoir que le film devait également contenir le court métrage de Pasolini : Toto au Cirque qui racontait l’histoire d’un dompteur qui cherchait en vain à faire parler un aigle. Le court métrage était d’ailleurs tourné avec les deux acteurs Toto et Ninetto.

9

Des Oiseaux Petits et Grands est une fois encore un film à part. En fait, Pasolini y mélange un peu tous les genres. Il y’a ce mélange de comédie loufoque et irrévérencieuse avec du drame social, ce qui peut évidemment rappeler le travail de Charlie Chaplin. Mais ici, c’est assez différent, car premièrement le dialogue joue un rôle très important et l’humour de Pasolini est particulier. En fait en soi, Des Oiseaux Petits et Grands n’a rien de potentiellement drôle, il n’y a pas vraiment de situations comiques. Mais c’est le ton totalement irrévérencieux de l’œuvre qui fait la différence. Rien qu’au début avec ce générique qui est chanté à haute voie, j’ai éclaté de rire.

Le film est également teinté de surréalisme, notamment à travers le personnage du corbeau mais également à travers pas mal de situations improbables.

10

Sur la structure narrative, Pasolini est assez incroyable. Surtout lors de la parabole du corbeau sur ces deux moines (qui sont en fait Toto et Ninetto) de l’an 1600 qui eurent pour mission difficile d’évangéliser les oiseaux et notamment les faucons et les moineaux. Cette parabole constitue en fait une grande partie du film et nous coupe alors du monde réel pendant un assez long moment avant d’y revenir. Pour autant cela est remarquablement géré.

Bien qu’une fois encore le film soit plus léger et que Pasolini le résume à une simple « mise en scène », Des Oiseaux Petits et Grands est très bien foutu visuellement. Quelques images sont absolument splendides. Rien que le final avec nos deux hommes marchant de dos le long de la route au crépuscule vaut le coup d’œil.

11

Au niveau de la musique, Pasolini a fait appel au très grand compositeur italien en vogue à l’époque, Ennio Morricone. Ce dernier a composé toute la BO du film. Ce n’est sans doute pas l’une de ses meilleures, mais elle correspond très bien au ton de l’œuvre.

Mais l’un des gros points forts de ce film, c’est son casting.

On retiendra bien évidemment le duo que forment Toto et Ninetto Davoli. D’un côté un daron à moustache assez rusé, tantôt sage, tantôt filou. Il est d’ailleurs marrant de le voir dans le rôle du père puis celui du moine qui sont assez différent (la différence est d’ailleurs soulignée par l’absence de moustache). Toto a un jeu très théâtral qui est absolument parfait.

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A côté de lui Ninetto Davoli plein de vie et d’humour et presque toujours avec un large sourire aux lèvres. Son jeu est très naturel et on a vraiment affaire à un authentique fanfaron.

Nous avons donc un duo ultra-attachant. Mais comme souvent chez Pasolini, les personnages sont très séduisants car authentiques. C’est le cas ici aussi, malgré le ton déjanté de l’œuvre. Il se dégage une telle sincérité de Toto et Ninetto, qu’on ne peut que s’attacher à eux. Je pense notamment aux scènes de rires qui sont vraiment touchantes tant elles paraissent authentiques.

13

Nous pouvons également évoquer le personnage du corbeau. Ce volatile doté de parole excellemment doublé par Francesco Leonetti. Le corbeau est un philosophe et un penseur qui nous est également décrit comme « Un intellectuel de gauche d’avant la mort de Togliatti ». Palmiro Togliatti était l’un des fondateurs du parti communiste italien. Il prônait une politique nationale pour une Italie autonome. Un discours qui devait beaucoup plaire à Pasolini qui choisit justement de lui rendre hommage à travers la séquence des funérailles. Le corbeau représente donc cette gauche là. C’est d’ailleurs un personnage triste qui finit lui-même par admettre son inutilité à la fin. Plus personne n’écoute ses discours et il finira par être dévoré par ses deux acolytes de voyage. On peut y voir une certaine symbolique. Pasolini semble nous dire que la vision gauchiste qu’il pouvait défendre est morte avec Togliatti. De là on peut même y voir un nouveau témoignage du génie visionnaire de l’artiste qui nous évoquerait un futur parti communiste ayant totalement renié ses idéaux. Le Corbeau représente donc la fin d’un certain intellectualisme de gauche laissant place à un certain néo-libéralisme où les oiseaux les plus gros mangent les plus faibles.

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La parabole des moines nous le montre bien, Les faucons aiment le même dieu que les moineaux mais cela ne les empêche pas de les dévorer. Nos deux héros passent eux-mêmes tour à tour du statut de faucon à celui de moineaux. A travers ce monde ornithologique, Pasolini nous dresse une métaphore de notre propre société.

Mais plus que tout, il représente aussi la lutte des classes sociales. Et il témoigne beaucoup de son amour pour la classe à laquelle appartiennent Toto et Ninetto. Il en admire en fait la simplicité. Les deux hommes semblent au final lassés par les discours gauchistes du corbeau et finissent par le dévorer bien cuit pour combler leur faim. C’est une classe sociale qui ne se préoccupe plus d’idéologie mais de sa survie. Cependant, à aucun moment Pasolini ne nous montre cette classe de façon péjorative ou négative, au contraire. Il en admire au final la légèreté. Cette même légèreté qui constitue le ton de son film.

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Au final, Des Oiseaux Petits et Grands est une vraie déclaration d’amour de la part de Pasolini. Et il s’inscrit parfaitement dans son œuvre artistique en s’attachant à montrer l’importance de la préservation des classes sociales.

Des Oiseaux Petits et Grands est donc une totale réussite, une œuvre drôle et touchante pas aussi légère sur son fond qu’elle ne l’est sur sa forme. Mais quoiqu’il en soit c’est peut être le film le plus attachant de Pasolini.                                    

 

Note : 16,5/20

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Commentaires
A
ça marche ! à bientôt...
V
A tous: Je serai absent pendant 3 ou 4 jours, ne vous étonnez donc pas si je ne répond pas à vos commentaires.
V
A tous: Je serai absent pendant 3 ou 4 jours, ne vous étonnez donc pas si je ne répond pas à vos commentaires
V
Ces deux films ne sont pas forcément essentiel mais à voir quand même. Comizi d'Amore devrait être celui qi t'intéresse le plus au vu de ta profession
A
pareil je n'ai pas vu ce film de Pasolini. FINALEMENT, je n'ai vu que ses films les plus connus. Une erreur à rectifier au plus vite...
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