Un Chien Andalou

Catégorie : Cinéma

Genre : Surréaliste

Année : 1929

Public : Tous Publics

Durée : 16 minutes

Nation : France/Espagne

Réalisateurs : Luis Buñuel

Acteurs : Pierre Batcheff, Simone Mareuil 

Synopsis : Un Homme tranche le nerf optique d’une jeune femme avec un rasoir. Un mendiant fait jouer une main dans la rue, des visions hallucinantes apparaissent à un couple dans un appartement. Une succession d’histoires insolites.

Analyse critique :

(Attention SPOILERS !)

Aujourd’hui, je continue notre cycle Dalí avec une œuvre cinématographique qui n’est pas propre au peintre espagnol. Il s’agit d’Un Chien Andalou, chef d’œuvre du cinéma d’avant-garde réalisé par l’immense Luis Buñuel, grand ami de Dalí. Cependant le peintre a joué un rôle majeur dans la conception du film qui reprend en grande partie son imagerie.

En réalité tout remonte à une rencontre entre les deux amis. Alors que Buñuel rendait visite à Dalí à Figueras, il lui raconta l’un de ses rêves. Le peintre en fit de même et eu alors l’idée de rassembler ces deux rêves et d’en faire la base d’un film.

En six jours, Dalí et Buñuel rédigent le script de ce qui sera baptisé Le Chien Andalou. Difficile de dire d’où vient ce titre étrange. Le grand poète espagnol Federico García Lorca affirma que c’était le surnom moqueur que lui avaient donné ses amis Dalí et Buñuel.

Le parti pris d’Un Chien Andalou est clair dés l’idée de sa conception, il s’agit de s’inscrire dans le mouvement surréaliste, puisqu’il est ici question de représenter l’inconscient et plus précisément le monde des rêves.

Un Chien Andalou est donc un court métrage qui se résume à une succession d’images et de scènes totalement surréalistes, issues de l’univers des rêves, voir des cauchemars. Tout semble cependant plus ou moins tourner autour des obsessions d’un couple. L’homme se laisse aller à ses pulsions envers la femme qui se défend.

La réalisation de ce chef d’œuvre est remarquable. On peut dire que Buñuel donne ses lettres de noblesse au mouvement surréaliste cinématographique. Réalisé en 1929, Un Chien Andalou est donc un film muet et en noir et blanc. Ces deux aspects sont pleinement exploités.

Buñuel sait manier sa caméra et nous propose de superbes plans de ces délires surréalistes. Mais c’est surtout l’imagerie du film qui marque à jamais, et c’est pour cela que j’ai choisi de l’aborder dans ce cycle Dalí, car c’est de l’univers du peintre dont il est question ici.

Les fourmis dans la main, les pianos et les ânes pourris, sont autant d’éléments graphiques qui nous rattachent à l’univers dalinien. En ce sens, Un Chien Andalou remplit très bien sa fonction et nous propose une plongée dans un univers cauchemardesque qui en appelle directement à notre inconscient.  

Un Chien Andalou est donc bien une œuvre d’avant-garde en transposant pour la première fois au cinéma la doctrine surréaliste d’André Breton concernant la fusion entre la réalité et le monde du rêve.

Mais la scène qui a évidemment traumatisé tout le monde est bien sûr l’ouverture, où un homme s’empare d’un rasoir et tranche en gros plan l’œil d’une femme. C’est sans doute la première énucléation montrée de façon très crue au cinéma et qui nous rappelle que la violence au septième art n’est pas un débat qui date d’hier. Aujourd’hui, en y regardant de plus prêt, on peut facilement voir que l’œil tranché est celui d’un animal. Mais ça reste très bien fait pour l’époque et même aujourd’hui l’effet de cette énucléation reste intact de par son aspect vraiment glauque et sordide. Cette séquence a beaucoup marqué un public peu habitué (pour ne pas dire pas du tout) à voir ce genre de scène au cinéma. Mais elle frappe aussi car elle est placée dés l’ouverture du film, ne laissant pas le temps au spectateur de s’installer confortablement. Elle est aujourd’hui devenue l’égérie du film et l’une des séquences les plus cultes de l’histoire du septième art.

Le film regorge également d’ingéniosités visuelles, comme des poils d’aisselles se transformant en oursins, ou des seins en fesses.  

Concernant la musique, le film fut à sa projection accompagné en bande sonore par le mythique Tristan Et Iseult de Wagner. Cette musique a été reprise lors de la restauration du film en 1960.

Concernant le casting, les deux acteurs parfaitement inconnus que sont Pierre Batcheff et Simone Mareuil remplissent très bien le quota. On note même les apparitions de Buñuel et Dalí en personnages secondaires. Buñuel interprète notamment la main qui tranche l’œil de la femme. 

Comment appréhender un film tel que Le Chien Andalou ? En fait il ne faut pas vraiment chercher de message ou de réelle logique dans un tel film. Un Chien Andalou est une œuvre purement expérimentale qui s’inscrit dans le surréalisme. Le but était de représenter le monde des rêves et de l’inconscient au cinéma. Mais il est également clair qu’aussi bien Buñuel que Dalí, ont voulu bousculer la société de l’époque et provoquer en faisant une telle œuvre contenant des scènes violentes et sordides. Dalí déclara lui-même : « Un Chien Andalou était le film de l'adolescence et de la mort que j'allais enfoncer comme un poignard en plein cœur du Paris spirituel et élégant. ». De son côté, Buñuel déclara, peut être de manière cynique, que le film était « un appel au meurtre ». 

Une fois encore, il convient sûrement de l’inscrire dans le cinéma expérimental. Lors de sa sortie, le film déclenchera d’ailleurs un certain scandale en raison de ses scènes de violence. Pour autant, il n’y aura pas les débordements que redoutaient Dalí et Buñuel. Ce dernier a affirmé qu’il avait même pris des pierres pour se défendre au cas où les choses dégénéraient. 

Au final, quel héritage laisse Un Chien Andalou ? Il est en fait incroyable d’en mesurer l’importance. Car ce chef d’œuvre marque une date essentielle dans l’histoire du cinéma. C’est d’abord le premier pas du mouvement surréaliste dans le septième art. Ensuite, c’est aussi un film qui va avoir une énorme influence en étant le premier à oser des concepts totalement à contre courant et une violence totalement inédite. Des géants comme Stanley Kubrick ont toujours revendiqué l’influence de Buñuel et on est en droit de penser qu’Un Chien Andalou y est pour quelque chose.

Le cinéma Panique que nous avons abordé récemment ici doit également beaucoup à ce film. C’est par son audace et son côté totalement novateur qu’Un Chien Andalou a su imposer une marque indélébile au cinéma. Ce film ouvrira par ailleurs la voie à Luis Buñuel dans le cercle des surréalistes dirigé par André Breton. Les relations avec Dalí seront plus conflictuelles comme nous aurons l’occasion de le voir sur ce cycle.

Par la suite, les deux hommes récidiveront avec cette fois-ci un long métrage : L’Âge d’Or en 1930. Un film culte également, que je n’aborderai pas ici, puisque Salvador Dalí, l’artiste concerné par ce cycle, l’a totalement renié estimant que le film était une œuvre d’un anticléricalisme puéril et primaire.

Aujourd’hui, Un Chien Andalou est considéré à juste titre comme un des plus grands chefs d’œuvres du cinéma d’avant-garde.

Un film culte à voir absolument.

Note : 20/20

Comments

[Alice In Oliver]

C'est ce qu'on appelle une blague à répétition...

[Vince12]

à Oliver: Ou j'ai vu que tu lui avais sorti celle là sur Ciné Choc ;)

[Alice In Oliver]

à vince: c'est le genre de séquence qui lui fait tourner de l'oeil !

[Vince12]

à Inthemood: Il n'y a pas grand chose à comprendre au final.C'est juste le monde de l’inconscient qui est retranscrit à partir de rêves de Dalí et Bunuel. C'est vrai que le DVD coûte la peau du cul. Quant à Tina, elle qui n'aime pas les énucléations en effet, on lui déconseillera.

[inthemoodforgore]

L'un des plus gros ovni de l'histoire du cinéma. Je n'y ai jamais rien compris et pourtant, j'adore. A noter que le dvd est très cher. En gros, un euro par minute de film... Il faut absolument que Tina voit la séquence de l'oeil, ça c'est cadeau.