Shining, L'Enfant Lumière

Catégorie : Littérature

Genre : Epouvante, Fantastique, Horreur, Drame Psychologique

Année : 1977

Nombre de pages : 571

Nation : USA

Auteur : Stephen King

Synopsis : L’Hôtel Overlook est considéré comme l’un des plus beaux endroits du monde et un véritable paradis de vacances. Perdu dans les montagnes rocheuses, il offre un luxe et un espace incomparables à ces clients. Mais l’hiver, pendant la saison morte, l’hôtel ferme. Les routes qui mènent à lui sont recouvertes de neige et l’Overlook se retrouve alors coupé du monde. Un gardien est donc engagé pour garder les lieux. Celui de cette année s’appelle Jack Torrance. Il garde donc l’Overlook avec sa femme Wendy et son fils Danny. Ce dernier possède un don spécial, le « Shining » qui lui permet de voir le passé, le futur et certaines personnes mortes. Son don lui indique que durant la saison morte, l’Overlook n’est pas si désert que ça. Dans cet immense hôtel, Danny sent la présence d’esprits malveillants du passé prêt à resurgir. Mais il sent surtout qu’un drame terrible se prépare.    

Analyse critique :

(Attention SPOILERS)

Aujourd’hui je vous propose d’aborder Shining, L’Enfant Lumière, soit l’un des livres les plus cultes du grand Stephen King.

Qui ne connaît pas cet auteur maître de l’épouvante littéraire et plus généralement du registre fantastique ? A cette époque, il avait déjà rédigé deux romans  qui étaient Carrie en 1974 et Salem en 1975. Deux livres d’horreur/épouvante à succès qui établissaient déjà le style de l’auteur.

En 1977 il se lance alors dans son troisième roman, Shining, L’Enfant Lumière. 

Trois ans plus tard, ce livre à succès devait servir de base à Stanley Kubrick pour une adaptation.

Récemment sur ce blog, nous avons abordé L’Orange Mécanique d’Anthony Burgess, également adapté par Kubrick. Pour le coup le cinéaste s’était montré très fidèle au matériau d’origine. Son adaptation cinématographique avait également fini par éclipser le livre.

Ici, il va se passer un peu le contraire. Kubrick se démarquera beaucoup du livre original et au début son film sera critiqué et jugé inférieur au bouquin.

Mais restons sur le livre de Stephen King. Ici l’écrivain nous décrit l’histoire d’un gardien d’hôtel qui va finir par se laisser dominer par les démons qui hante les lieux.

Nous reviendrons plus précisément sur les personnages plus loin. Mais en ce qui concerne l’écriture, King parvient véritablement à créer un univers à la fois réaliste, fantastique et dérangeant. Il instaure une vraie ambiance en jouant superbement bien sur le suspense, l’épouvante et installe ainsi une véritable tension et une réelle terreur, qui vont crescendo. Bref King n’a pas volé sa réputation de maître de l’épouvante. Il sait parfaitement jouer avec notre inconscient pour en faire ressortir des peurs profondément enfouies. La terreur est toujours particulière chez King car elle possède toujours une certaine réalité sociale comme nous le verrons plus loin.

Premièrement, là où l’auteur a fait fort, c’est sur le décor. Alors que son histoire est basée sur le principe de la maison hantée, il prend pour décor un gigantesque hôtel de Luxe. Et c’est là qu’il peut court-circuiter l’esprit et l’imagination du lecteur, car il fait surgir la terreur dans un lieu ludique et apaisant. Ce procédé est très dérangeant, vu que l’on a au final plus rien à quoi se rattacher. Puisque même les lieux les plus plaisants et séduisants peuvent être hantés. Ainsi King se montre une fois de plus très malin en plaçant le lecteur dans un décor ludique, qu’il décrit très bien pour en faire ressortir les éléments familiers, et dans lequel ce lecteur peut se sentir dans un premier temps en sécurité. Puis il instaure la peur dans ce décor créant ainsi un sentiment de terreur absolue.

Mais King est aussi un grand maître du fantastique. Mais je dirais que c’est surtout un spécialiste de ce que moi j’appelle le « fantastique métaphorique ». Car chez lui, le fantastique est toujours là pour servir une intrigue réaliste. Ici, en l’occurrence, l’hôtel hanté représente les démons de Jack Torrance : l’alcoolémie, la violence, la folie. A ce propos Shining, L’Enfant Lumière reste une œuvre très personnelle car King était lui aussi passé par une période d’alcoolémie. Ce livre est donc presque un réquisitoire. Mais pour en revenir à la notion de « fantastique métaphorique », On sent clairement que Shining a une certaine dimension sociale. Le livre traitant de sujets comme l’alcoolémie que j’ai déjà évoqué, mais aussi la crise familiale et la violence domestique. Au final l’histoire que le livre raconte pourrait être un de ces faits divers que l’on voit tant dans les médias.   

Mais parlons plus précisément des personnages.

Le principal c’est Danny, « l’enfant lumière ». Ce jeune enfant possède un don exceptionnel et rare, le « Shining » qui lui permet de voir des choses que les autres ne peuvent pas voir. Il peut ainsi percevoir des visions du passé et même de l’avenir. Mais il peut également voir des personnes mortes ou plus ou sorties tout droit de son inconscient. C’est le cas de Tony son « ami imaginaire » qui lui apparaît de temps en temps et qui le projette parfois dans d’étranges visions. On ne sait pas vraiment qui est Tony. Est-ce un enfant décédé ? Ou est-il un pur produit de l’imagination de Danny ? Quoiqu’il en soit, on réalise que le « Shining » est particulièrement développé chez Danny. L’enfant a donc conscience assez rapidement que l’Overlook est un lieu hanté et que des choses terribles risquent de s’y produire. Cependant, il pense à son père qui a ici l’occasion de réussir quelque chose pour la première fois dans sa vie professionnelle. Il est donc tiraillé entre la peur et l’amour de son paternel.

Parlons donc de Jack Torrance qui pourrait être quelque part lui aussi considéré comme le personnage principal. Jack est un écrivain raté et ancien prof de littérature qui s’est fait renvoyé de l’école où il enseignait. A travers ce poste de gardien de l’Overlook, Jack pense se reconvertir. Il veut enfin réussir un job dans sa vie et en même temps trouver l’isolement nécessaire à l’inspiration pour écrire un nouveau livre. La cause de ses anciens ennuis était surtout l’alcoolémie. Aujourd’hui, Jack semble avoir vaincu ce vieux vice qui va pourtant ressurgir dans l’hôtel. Mais ses autres démons vont également ressortir : l’obsession et la violence.

On a ensuite le personnage de Wendy qui est une jeune femme assez sûre d’elle et qui est au final un peu le contraire de Jack car elle semble réussir ce qu’elle entreprend. C’est plus ou moins la personne la plus « normale » du livre. Elle est la dernière à réaliser ce qu’est vraiment l’hôtel Overlook. Pour autant elle finira par avoir un rôle héroïque dans l’histoire.

On trouve aussi le personnage d’Hallorann le grand cuistot noir de l’Overlook et qui possède lui aussi le don du « Shining ». Quelque part, ce personnage apparaît comme la préfiguration de John Caffey de La Ligne Verte que King écrira en 1996. Hallorann a une dimension quasi mystique voire même prophétique. C’est un personnage vraiment intéressant.

Mais dans la liste  des protagonistes, certains analystes ont jugé bon d’inclure également l’Hôtel Overlook qui est en quelque sorte un personnage. L’hôtel semble en effet agir tel un esprit machiavélique qui déchaîne ses forces envers certains de ses hôtes. Il paraît même user d’une véritable stratégie pour faire basculer Jack dans la folie et pour empêcher Danny de sauver son père.  

Sur le fond, Shining, L’Enfant Lumière s’apparente avant tout à un drame psychologique intense maquillé en livre d’épouvante-horreur. Ainsi les fantômes, ne sont que la représentation des démons intérieurs du personnage de Jack. On découvre un homme obstiné par sa réussite en tant qu’homme mais aussi en tant que père (l’obsession paternelle transparaît cependant à mon avis plus dans le film de Kubrick). Des obsessions qui finissent par mener Jack à la folie. Rien de fantastique dans cette histoire qui est un drame social. Une fois encore, King se sert de ce registre comme métaphore et il y parvient plus que bien.

Shining, L’Enfant Lumière est une œuvre incroyablement fascinante de bout en bout. C’est un livre intense qui illustre selon moi très bien ce que Stephen King sait faire de mieux dans la littérature contemporaine.

A sa sortie, Shining, L’Enfant Lumière ne dérogea pas à la règle. Tout comme les deux précédents bouquins de l’auteur, ce fut un énorme succès. Comme je l’ai dit plus haut, il sera même porté à l’écran par Stanley Kubrick qui se démarquera beaucoup de l’œuvre originale. A tel point que King reniera le film et réalisera lui-même un téléfilm en deux parties bien des années plus tard. En 2013 il donne même une suite littéraire à son histoire intitulé Docteur Sleep.

Aujourd’hui, Shining, L’Enfant Lumière est tout simplement l’une des œuvres les plus cultes du grand Stephen King. A lire absolument. 

Note : 18,5/20

Comments

[Vince12]

à Titi: Pour ma part je n'ai pas lu les Vampires de Salem. Tu me diras ce que tu pense de Docteur Sleep, mais les echos que j'en ai eu c'était: "pas mal mais sans plus."

[titi70]

Pas lu ce livre, mais, je suis en train de lire justement Docteur Sleep qui en est la suite. Va falloir que je me consacre la version littéraire de Shining. Pour l'instant, mon King préféré reste indéniablement Les Vampires De Salem, dont aucune adaptation n'a su jusqu'ici rendre justice à ce génial bouquin.

[Vince12]

à Tina: Je ne peux que te le conseiller. Une fois encore même si tuas vu le film.

[tinalakiller]

Je n'ai toujours pas lu ce roman alors que j'adore le film et que le peu de livres de King que j'ai pu lire m'ont plu (surtout que j'ai celui-ci chez moi, grâce à mon père, grand fan de King).